Colloque international de la SOFPHIED : "Éducation et politique. Enjeux philosophiques contemporains : crises, critiques, alternatives"

https://www.sofphied.org/colloques/colloque-2022/article/colloque-de-la-sofphied-2022-education-et-politique-enjeux-philosophiques 

Éducation et politique
Enjeux philosophiques contemporains : crises, critiques, alternatives
Colloque annuel de la Société Francophone de Philosophie de l’Éducation (Sofphied)
Inspé de Créteil, site de Bonneuil sur Marne

1, 2 et 3 juin 2022


En 2002, Marie-Claude Blais, Marcel Gauchet et Dominique Ottavi signaient un ouvrage intitulé Pour une philosophie politique de l’éducation, visant à construire un travail d’identification des problèmes politiques sur les questions d’éducation et d’école. Il s’agissait alors de prendre du recul sur des questions vives en éducation, en interrogeant les conditions de possibilité d’une éducation à la démocratie.
Depuis, les recherches en éducation articulées à la question politique se sont beaucoup développées dans le domaine des sciences sociales : le courant de la « pédagogie critique » et la sociologie des inégalités scolaires ont investi cette question ; le concept de « forme scolaire », proposé par Guy Vincent, a été investi par les sciences de l’éducation. D’autres travaux se tournent vers l’histoire pour considérer des modèles « autres » d’école ou d’éducation, en marges de l’historiographie habituelle – comme, par exemple, les modèles socialistes ou celui de l’école de La Commune de Paris. Mais dans le domaine de la philosophie de l’éducation, peu de textes abordent spécifiquement cette question, a contrario d’une production vive dans le milieu anglo-saxon ; ainsi, excepté un moment de défense d’une certaine idée de l’école républicaine, on fait état de peu de textes de philosophie politique de l’éducation.
Ce colloque se donne pour objectif de combler en partie ce manque, en interrogeant d’un point de vue philosophique les liens entre éducation et politique à la lumière des enjeux actuels. Il s’agira autant de lire des oeuvres philosophiques, classiques ou récentes, dans notre contexte contemporain que de s’interroger sur les différents écrits de philosophie politique (héritage de l’École de Francfort, pensée du care, théories critiques, concept de capabilité…) et leurs conséquences éducatives.
Il s’agira également d’éclairer comment l’éducation et l’école, ingrédients essentiels et indissociables du politique, qui sont aussi un instrument possible de la politique, peuvent être réfléchis dans notre contexte spécifique, celui d’une crise démocratique, d’une abstention massive et de l’extension de phénomènes qui peinent encore à être circonscrits – revendications nommées populistes ou populaires, défiance envers l’école et les institutions en général. L’école vit comme en miroir ces enjeux, parfois selon un effet de loupe ou de cristallisation (agir à l’école faute d’agir ailleurs). Si nous savons que l’école est un levier indispensable pour faire corps politique, comment penser l’école si nous ne savons de quoi ce corps politique est désormais constitué, et comment il l’est ? Quelles formes de l’émancipation par l’éducation et par l’école sont possibles et souhaitables ? Les « valeurs de la République » et l’invocation du « vivre ensemble » sont-elles des éléments suffisants ? Comment articuler une nécessaire critique de l’école avec l’éducation politique indispensable à la construction de la citoyenneté ? Et par-delà la dénonciation d’une crise conjointe de l’école et de la démocratie, est-il possible d’identifier des éléments d’émancipation, d’alternatives, de constructions ou de reconstructions ?
De manière traditionnelle pour les colloques de la Sofphied, ces interrogations seront menées en articulation avec un double contexte :
- un contexte local d’abord, celui du lieu où se déroulera le colloque : l’Inspé de Créteil se situe au sein d’une académie où les inégalités sont particulièrement fortes et où cette articulation entre éducation et politique est particulièrement vive ;
- un contexte global ensuite, celui des modifications relatives au concours de Professeurs des Écoles : les changements qui en découlent mettent désormais la philosophie en danger dans les lieux qui ont toujours été pour elle, historiquement, un point d’ancrage et de rayonnement, ceux de la formation des enseignants. Rappeler l’importance de la philosophie dans la réflexion sur l’école ainsi que son rôle politique (analyse et transmission des valeurs éducatives, de la déontologie de l’enseignant, des pédagogies possibles) constitue un enjeu crucial à défendre.
Le présent colloque, organisé sous l’égide de la Société Francophone de Philosophie de l’Éducation, s’attellera à réfléchir à ces questions en prenant plusieurs angles possibles :
1/ La place et la teneur de l’éducation politique
Les communications s’intéressant à cette question pourront aborder les formes (éventuellement nouvelles) de l’éducation morale et civique ou à la citoyenneté, de la formation à l’esprit critique ; questionnant le rôle de l’école, elles pourront s’interroger sur la tension possible entre la transmission de valeurs et la critique de ces valeurs ou de leur mise en application, dans un contexte de défiance de plus en plus grande envers les institutions. Qu’est-ce que la crise ou la défiance envers les institutions fait à l’école, et à l’éducation en général ?
Ces questions peuvent être particulièrement cruciales dans les Inspé, où se forment les futurs enseignants, mais également sur des territoires où les inégalités sont criantes. Quelles constructions ou reconstructions pourraient être possibles, et selon quels modèles ?
2/ Institution école et projet politique : la « crise » en question et ses alternatives
Les communications de cet axe pourront interroger la teneur de l’institution école dans notre contexte contemporain. Comment l’école est-elle pensée dans un contexte néolibéral, mais aussi populiste ? Que peut-on en penser ? Quelles sont les configurations et reconfigurations de l’articulation entre école et capitalisme ? Quelle est désormais la place des « professeurs » des écoles et non plus des « instituteurs » et « institutrices » ? Quelle peut être la formation du commun issue de ce contexte, et sur quelles bases (nation ? peuple ? communauté ? individu ?)
Pourrait-on décrire des propositions alternatives ou nouvelles, sur quels fondements philosophiques et politiques ? Quelles modifications institutionnelles, organisationnelles ou pédagogiques supposent-elles – par exemple au regard de la forme scolaire ou des pédagogies employées ?
3/ Propositions et usages contemporains de la philosophie politique de l’éducation
Que pourrait-on déduire de propositions contemporaines de philosophie politique (libéralisme, républicanisme, par exemple) pour l’éducation ? Quelles sont les implications scolaires et éducatives de ces pensées contemporaines ? Pourrait-on lire ou relire des philosophes ou des textes considérés comme classiques de philosophie à la lumière de nos enjeux contemporains ?
La question du modèle politique à l’oeuvre dans les pensées pédagogiques, mais aussi dans des modèles nouveaux – comme la « neuroéducation » et les pratiques dites « scientifiquement fondées » – pourront également être une piste de réflexion. En conséquence, les intervenants pourront aussi s’interroger sur les effets politiques de pratiques pédagogiques (comme la question essentielle de la liberté pédagogique, par exemple)
4/ Éducation et politique hors de l’école
Enfin, les intervenants pourront s’interroger sur les enjeux politiques d’une éducation hors de l’école : éducation familiale (et rôle de la famille comme instance articulée ou non à l’école) ; éducation populaire ou autres formes d’éducation politique. Comment penser ces modes d’instruction autres que sont l’école à la maison ou la déscolarisation ? Faut-il y voir une forme nouvelle d’éducation totale ? Comment comprendre cette prise de distance à l’égard de l’institution ?
 

Programme :

Mercredi 1er juin

13h30 accueil

14h-14h30 : Ouverture

14h45-15h45 : Conférence, Eirick Prairat : « Condorcet, l’École et la République »

16h-17h30 : Ateliers 1

Atelier A

Riondet, Xavier « L’Arendtisme et l’Althussérisme sont sur un bateau…La « crise » de la philosophie de l’éducation face aux inégalités » 

Langar, Samia : « La philosophie politique de l’éducation à l’épreuve de la pluralité » - 

Coste, Cyprien, Une philosophie politique de l’éducation au sein des institutions démocratiques ? 

Atelier B

Robert, André, Du programme de « l’éducation-basée-sur-la science » aux conditions socio-épistémiques d’un progrès de la Raison éducative 

Goubet, Jean-François, Compétence et résonance à l'école. Les tensions entre les acceptions politique et pédagogique de la compétence à partir de l’œuvre de Hartmut Rosa

Del Rey, Angélique, Legeay, Vincent, Aptitude professionnelle, compétence scolaire. Micro-archéologie d’un « schème administratif de classement » 

Atelier C

Ferté, Louise : « Universel et formation des enseignants »

Gambou, Alfred : « La formation des enseignants et les enjeux d’une éducation émancipatrice à l’école »

 

Jeudi 2 juin

8h45-9h15 : Accueil

9h15-10h15 : Conférence Nicolas Piqué : « Crise de l’institution scolaire : attendus pédagogiques et anthropologiques »

10h30-12h : Ateliers 2

Atelier D

Chauvigné, Céline, Les questions socialement vives : vers un renouveau dans une formation du citoyen en milieu scolaire ? 

Fabre, Michel : L’enseignement des Questions socialement vives. Quelle légitimité politique ?

Roth, Xavier et Barthes, Angela : « Accompagner », « Sensibiliser », « Partager » : analyse d’une dépolitisation de l’éducation par son schème conceptuel. Le cas de l’éducation au développement durable

Atelier E

Péraud-Puigségur, Stéphanie, Primum non nocere. Comment comprendre certains effets paradoxaux de l’éducation à la citoyenneté en contexte scolaire ?

Bourcier, Benjamin, Deux modèles d’éducation cosmopolitique

Jacomino, Baptiste, The Wire : Entre stratégie gouvernementale et tactique pédagogique

Atelier F

Goutagny, Sarah, La révolution pédagogique en France Ecole, langue, inégalités 

Roelens, Camille : « A quoi rassemblerait une philosophie politique de l’éducation randienne ? Raisons de se poser la question, lectures, médiations francophones, critiques »

13h30-14h30 : Conférence, Sophie Audidière : « Aux bords de l’anthropologie et de la politique modernes ? Philosophies matérialistes de l’éducation »

14h45-16h : Tables rondes

Table ronde 1

Lebrun, Anne-Lise, Réflexions sur les cours d’autodéfense intellectuelle : une expérience de l’éducation politique menée plusieurs années dans un collège de Seine-Saint-Denis 

Akou Olga, Politique d'éducation, éducation politique : vers un rôle émancipateur de l'éducation 

Jouzeau Clothilde et Prévot Cédric, Les parents à l’école en contexte(s) de coéducation 

Table ronde 2

Guilpain, Geneviève, La classe de philosophie peut-elle être encore un espace  de conscientisation politique  et d’émancipation intellectuelle ? 

Budex, Christian : Développer un affect commun de la rationalité et de la fraternité par la pratique de la Discussion à Visée Philosophique à l’école : une approche lordonienne de l’Enseignement Moral et Civique 

Herla, Anne, « Quelle posture philosophique pour une éducation à la citoyenneté qui ne refoule pas le conflit ? »

16h-17h30 : Assemblée générale de la Sofphied, suivie d’un pot

 

Vendredi 3 juin

9h-9h30 : Accueil

9h30-10h30 : Conférence, Jean-François Dupeyron, « Trouble(s) dans l’universel »

10h45-12h15 : Ateliers 3

Atelier G

Dufourt Pénélope : Quelle éducation aux droits de l’homme ?

Charbonnier, Vincent, De la formation à la certification : la question du commun

Atelier H

Hawken, Johanna, (Re)construire une pédagogie politique d’éveil à l’esprit critique : l’éclairage de bell hooks pour l’école contemporaine 

Pereira, Irène, Education populaire et critique de la vie quotidienne - une perspective de philosophie politique par le bas

Kerlan, Alain, De l’art comme politique éducative en régime esthétique »

Atelier I

Oblin, Nicolas : « Assiste-t-on à une défaite de la pensée pédagogique ? »

Colon, Lionel, L’éthique néo libérale et le nouvel esprit de la pédagogie

14h-15h30 : Ateliers

Atelier J

Pittet, Mathieu, Le rattrapage de quelques héritiers en déroute dans les ghettos dorés de l’enseignement secondaire français : un point d’observation stratégique sur la fabrique du sujet en contexte néolibéral

Pouteyo, Michaël, Enfance en marge, rééducation et politique : le travail de Fernand Deligny 

Moreau, Mathias, Le souci de soi : pour une émancipation aristocratique et solaire (initialement dans l’atelier F, à confirmer)

Atelier K

Kouyimoussou, Virginie : La formation de l’homme dans les réflexions politiques de Julius Nyerere 

De Carvalho, José Sérgio Fonseca : Vertus et limites de la scission entre politique et éducation chez Arendt

Atelier L

Ronci, Martina, De moral à moralisateur, réflexions croisées sur la place de l’éducation morale en France et au Japon 

Schwimmer, Marina, Quelle place pour la dimension politique à l’école ?

Brassat, Emmanuel, De l’institution politique de l’école à la forme scolaire : conservation, avatars et transformations

15h45-16h15 : conclusion du colloque